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Les artistes des affiches de la Fête des Vendanges

par Diane Esselborn,
conservatrice du Musée de Saint-Imier et membre du comité du Musée de l'Areuse

19 octobre 2016

 

Pierre-Henri Béguin, président du Musée de l'Areuse, présente Diane Esselborn, membre de l’équipe dirigeante du Musée de l’Areuse, conservatrice du Musée de Saint-Imier. Nous lui devons notamment l’exposition temporaire 2015. Elle a également conçu une exposition à Genève.


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1921


1923


1926


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L'histoire de l'affiche
Les affiches de la Fête des Vendanges constituent le sujet du mémoire que Diane Esselborn réalise actuellement.

Une trentaine d’artistes ont réalisé les 58 affiches couvrant les fêtes de 1906 à 1981. Celle de 1906 est la première affiche connue aujourd’hui (alors que la première Fête des Vendanges a eu lieu en 1902). Et celle de 1981 porte le logo qui est repris depuis sur tous les supports.

Cette collection donne une vision globale de l’art à Neuchâtel au XXe siècle. Les créateurs de ces affiches sont des Neuchâtelois (habitant dans ou en dehors du canton) ou des personnes habitant le canton depuis plusieurs années.

Diane Esselborn commence par parler de ce que représente une affiche; elle expose ensuite le contexte dans lequel apparaît la Fête des Vendanges.

« Toutes les affiches dont on se souvient se sont gravées dans la mémoire parce que l’image créée par l’artiste est devenue indissociable du produit et de son nom. » (Leonetto Cappiello)

Une affiche est créée à partir de deux éléments: une composante artistique et une composante commerciale. Parfois le côté commercial prime sur l’artistique. Avec une affiche, le travail de l’artiste est exposé à tous. L’affiche est apparue à la fin du XIXe siècle. Auparavant, les placards existaient déjà depuis fort longtemps. Les affiches sont arrivées avec l’Art Nouveau, par les peintres et non par les commerçants. Elles apparaissent donc dans la société post-industrielle. Il y a des biens de consommation à vendre, les villes grandissent et l’affiche se développe dans les villes. Internationalement. C’est aussi grâce à l’invention de la lithographie. L’affiche peine à s’imposer en Suisse, d’abord parce qu’il n’y a pas de grandes villes à la fin du XIXe siècle et que nous avons quatre langues nationales. En 1896, l’exposition nationale de Genève lance véritablement les affiches.

Au début, ce sont les artistes, surtout des peintres, qui utilisent ce support. Petit à petit, les publicitaires dictent leurs travaux et entravent la créativité. La Guerre amène aussi une utilisation de l’affiche, afin de montrer que le pays XY est le plus fort. Après la Guerre, des artistes vont se spécialiser dans l’art de l’affiche, ce qui donne naissance au métier de graphiste.

La Seconde Guerre mondiale va amener en Suisse des spécialistes de l’affiche, spécialistes qui vont créer le «style suisse», qui obtient un quasi monopole. Le caractère typographique «Helvetica» est créé dans la foulée. Les affiches vont commencer à jouer sur l’émotionnel.

Au XVIIIe siècle, Neuchâtel est une place forte et riche. Mais il n’y a pas d’artistes formés et les nobles doivent demander à des artistes de passage de faire leur portrait. En 1895, l’Académie des beaux-arts de Paris va être créée. L’horlogerie se développe à Neuchâtel. Elle a besoin de graveurs et d’artistes pour décorer ses produits. Les horlogers vont envoyer des jeunes gens de Neuchâtel étudier à Paris. Mais, à Paris, on forme des artistes et non des artisans. A leur retour, c’est une catastrophe, parce qu’ils ne peuvent pas écouler leur production, sauf quelques-uns qui trouvent un job dans l’horlogerie.

Maximilien de Meuron fait don de deux tableaux à la Commune de Neuchâtel, en lui demandant de créer un musée avec comme base ces deux tableaux. La Société des amis des arts est créée. Elle commence à acheter des œuvres ce qui va mener à la création du Musée des beaux-arts. L’école de La Chaux-de-Fonds va être créée par Charles L’Eplattenier. Il va former des personnes qui réalisent des affiches. Neuchâtel devient un important foyer artistique en Romandie. Lorsque Neuchâtel était sous domination française, deux de ses artistes ont été primés.

La Fête des Vendanges
Le lac de Neuchâtel était entouré de vignes. Pendant la récolte, on avait le droit de chanter et de danser, de faire de la musique. C’est la genèse de la Fête des Vendanges. Il y a aussi la tradition de la «dernière gerle» qui est accompagnée d’une farandole bruyante.

En 1900, un cortège qui se forme. La vigne disparaît de la ville de Neuchâtel, parce que les vignerons tombent dans la pauvreté.

En 1902, le Vélo-Club va commencer à s’organiser autour de ces traditions, organiser un comité et créer vraiment une fête.

1903, la tradition s’installe. La fête a lieu à la fin des vendanges.

1904, le cortège des vendanges est organisé. La Fête des Vendanges s’installe réellement dès 1925.

1910 est une année catastrophique pour la vigne. Récolte désastreuse. La fête est annulée.

En 1911, la Ville ne soutenant pas le projet, on abandonne.

1912 voit la réintroduction de la fête, mais il est difficile d’obtenir de l’argent. En octobre, la guerre des Balkans éclate. Elle débouchera plus tard sur la Première Guerre mondiale. Abandon de la fête.

En 1921, la fête est relancée. Les autorités ne s’intéressent pas à ce projet, mais la population oui.

En 1924, le manque d’argent se fait à nouveau sentir. Pas de fête organisée, mais des gens viennent de toute la Suisse au début du mois d’octobre pour fêter, alors que rien n’est organisé. Cela va toutefois motiver un nouveau comité pour relancer la fête.

Depuis 1925, la fête a lieu sans interruption, à l’exception des années de la Seconde Guerre mondiale.

Reprise en 1945. Et malgré les problèmes d’argent, elle n’a plus jamais été abandonnée.


1907


1912


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1946


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1979

1980


En 1981, un concours est organisé dans le but de créer un logo. Il est ouvert aux artistes du cortège et aux membres des associations de graphistes. C'est le dernier concours à avoir été organisé à ce jour.

Jean-Jacques Zimmermann remporte le concours. Son logo est encore aujourd'hui utilisé sur toutes les affiches, légèrement décliné toutefois.

Contrairement à ce qui s'est fait jusqu'alors, l'artiste a mélangé la vendange et la mascarade. En référence, typique de Neuchâtel, à la tradition de la dernière gerle!



La tradition de fêter la dernière gerle

Les affiches et leurs auteurs
Comme dit plus haut, la première affiche connue date de 1906. C’est le premier imprimé promotionnel de la fête. Tiré à des milliers d’exemplaires, il a été envoyé en Suisse (cantons limitrophes), en France et en Europe. A l’époque, les CFF offraient des transports particuliers vers la France pour que les personnes puissent venir à Neuchâtel.

Très vite, la maison Attinger aura le monopole de l’impression des affiches.

Concernant les affiches des fêtes de 1906 à 1923, nous n'avons que peu d’information sur le choix des artistes, les critères de sélection.

La majorité des affiches sont signées.


Dès 1925, un concours est organisé.

Dès 1950: il n’y a plus de concours. Ce sont des artistes qui participent au cortège qui vont être choisis.

En 1975: Réintroduction du concours.

Etant donné le coût d’un concours, il est proposé de n’organiser un concours que tous les deux ans. Une année, le premier classé est édité et l’année suivante le deuxième est édité. La création des affiches est réservée aux Neuchâtelois, soit habitant Neuchâtel depuis longtemps, soit Neuchâtelois habitant ailleurs. Ces concours vont donner parfois lieu à des expositions de tous les projets reçus.


Au centre, l’artiste qui a remporté le concours (Paul Bovet). A droite et à gauche, des affiches qui n’ont pas été retenues, mais qui ont été conservées quand même.


Affiches d'Alfred Blailé: réminiscence de l’Art Nouveau, le végétal entoure les personnages. La jeune fille tient dans sa main un bâton appelé «tirce», accessoire utilisé par les bacchantes.


Deux œuvres de Jean Convert: on passe à l’Art Déco. Les personnages forment un triangle qui amène le regard vers l’information écrite. Le motif n’est plus centré sur le travail viticole, mais sur la mascarade (référence à la dernière gerle).


L'affiche de Léon Perrin est la première choisie sur concours. Conformément au règlement du concours, le personnage symbolise la vendange et non plus la mascarade. Par la suite, il n’y aura plus de motif représentant si clairement la vendange.


Comparaison de l'affiche de Léon Perrin avec les deux qui l’ont précédée et les deux qui l’ont suivie.

En 1925, le motif de l'affiche est repris sur le programme officiel.

Deux affiches crées par les frères Röthlisberger: Ernest (1926), orfèvre, et Paulo (1946), sculpteur.

La seule affiche (1930) créée par une femme: Pierrette Bauer-Bovet. L’arlequin est un personnage récurrent des affiches. C’est un personnage comique remis au goût du jour par Picasso, notamment.

Trois affiches de Ferdinand Maire, graphiste: il n’a jamais remporté le concours, mais il est arrivé au deuxième rang.

La même année (1931), il crée un char pour la Fête des Vendanges, donne le titre «Les Pierrots», comme son personnage sur l’affiche.

Première et troisième affiche de Ferdinand Maire: 1931, œuvre de graphiste, plus vendeuse. 1947, plus artistique: il a quitté sa profession de graphiste pour s’adonner à la peinture.


En 1948, Jean-Louis Béguin, architecte, a choisi le thème de l'épouvantail (affiche de droite). Comparé avec l'affiche de Pierre-Alexandre Junod (créée en 1939, mais il n’y a pas eu de Fête des Vendanges), l’épouvantail porte le même habit des Canaris. En 1948, le costume est cependant porté de manière moins stricte.


Cinq affiches avec représentation de la ville de Neuchâtel (les quatre ci-dessus + celle de Jean-Louis Béguin): Neuchâtel est un emblème peu utilisé sur l’ensemble du corpus.

Daniel de Coulon : n’a jamais remporté le concours. Graphiste pour les deux premières, la dernière est plus artistique. La première affiche de Coulon est une représentation du verre de vin, ce qui est très rare. Trois affiches seulement.

La Fête des Vendanges est plutôt représentée par la mascarade, plutôt que par le vin. A l’époque, le cortège était l’événement principal et les réjouissances secondaires. Aujourd’hui, c’est le contraire.

Dans sa dernière affiche, de Coulon représente un oiseau, ce qui est unique. Les deux autres illustrations sont des tapisseries.

Quatre affiches non figuratives (sur 58): 1967, 1971, 1972 et 1973.

Dès 1950, le profil des artistes change. Entrée en lisse des décorateurs. Ce sont des personnes du monde des chars qui présentent aussi des affiches.


Récurrence des éléments graphiques


La vigne, le raisin apparaissent sur 42 affiches (sur un total de 58). Ci-dessus, trois affiches comme exemple.

 


Les vendanges (fouloir, épouvantail, gerle, par exemple) apparaissent sur 18 affiches (sur un total de 58).


La mascarade (Pierrot, Arlequin, masque): 35 affiches sur 58.

La musique (accordéon, trompette, danse et flûte): 4 sur 58.

Y a-t-il ressemblance avec les affiches d'autres fêtes?


Autres fêtes des vendanges.

 


Carnavals.


Clairement NON!

Les affiches de la Fête des Vendanges de Neuchâtel sont vraiment uniques!

 
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© Musée de l'Areuse, Boudry, 2002
mise à jour: 11 Décembre, 2016